PÉRIGNAC : PAICHEL ET L’HOMME DE NÉANDERTAL

L’homme et son chien se retrouvèrent dans une plaine baignée par le soleil matinal. Des oiseaux de proie survolaient des hautes collines des environs et des bruits d’objets frappés avec un certain rythme se rapprochaient de nos deux amis. Paichel et Ciboulette ne pouvaient s’orienter dans ce champ inconnu. Un genre de cri retenu se fit entendre derrière le pauvre homme qui se retourna pour voir un groupe de primitifs. C’étaient quelques-uns des membres de cette race humaine appelée : L’Homme de Néandertal.

On peut s’imaginer la réaction des Hommes de ces temps-là lorsqu’ils virent ce personnage d’une autre époque! C’était surtout sa petite barbiche et son menton qui les fascina ou effraya le plus. En effet, l’homme de Néandertal ne possédait pas de menton. On aurait dit que la nature n’avait pas encore entreprise la beauté physique de l’humain en lui permettant, justement, de se distinguer de son cousin le SINGERIUS DES ARBUS ABANANUS... Quoi qu’il en soit, le pauvre Fontaimé Denlar Paichel sentit une main d’un brave Néandertalien lui saisir la barbiche en criant craintivement : “Piu-Piu... Piu-Piu.” Cela voulait dire simplement dans cette langue primitive “MENTON POILU.”

On pourrait se demander comment se sentirait un homme qu’on enverrait quelque trente-cinq mille ans en arrière, à l’époque préhistorique ! C’est pourtant ce qui arrivait à ce pauvre habitant du moyen âge. Une dizaine de primitifs se trouvaient autour de lui et criaient des : “piu-piu, piou-ciou-diou...” Cela faisait beaucoup de IOU-IOU tout d’un coup ! Paichel n’y comprenait rien et Ciboulette jappait comme un damné, sans doute effrayé par les ancêtres de l’Homo sapiens. Ses wouf-wouf, mêlés aux diou-piou-kiou-kiou répétés des hommes armés de pierres de silex, n’avaient rien pour rassurer son maître Paichel.

Finalement, le vol rapide de plusieurs oiseaux de proie mirent un terme à ce langage de WOUFFIOULAGUAIS. En effet, il s’agit d’un mariage entre les “wouf” de l’un et des “iou-iou” des autres. Les oiseaux voraces avaient l’aspect d’un gros pélican à fourrure, avec un bec d’aigle et des serres encore plus longues que les chimères mythiques. Les ailes ressemblaient à celles des chauves-souris. Dans un monde préhistorique, on pouvait s’attendre à retrouver des espèces d’oiseaux qui disparurent heureusement du globe. “Giou-Giou”, s’écrièrent ces primitifs figés de peur. Paichel comprit que Giou-Giou désignait ces terribles volatiles. Ils piquèrent sur tout le monde sans distinguer qui pouvait être le plus savoureux. Le visiteur d’une autre époque frappa un sale oiseau sur le bec et son poing d’ancien forgeron fit son effet. La chance voulue qu’il frappe justement le chef de ces volatiles puisque les autres fuirent le champ en demeurant sur leur faim. Les primitifs trouvèrent l’oiseau étendu sur les hautes herbes et ne prirent aucune chance avec lui. Qu’il soit mort ou juste assommé n’avait plus d’importance. Il fut lapider sur place. Puis, réalisant que cet étranger venait d’accomplir un acte remarquable, l’un des hommes de la tribu dit aux autres : “Piu-Piu-hou-Giou.” C’est-à-dire : “Menton poilu a tué un Giou.” Les mots amicaux devenaient inutiles à présent que cet inconnu venait de les soutenir dans cette attaque surprise. Il n’est pas certain que cela pouvait rassurer Ciboulette de se faire étirer une oreille par le responsable du groupe. Il cessa de japper mais Paichel grimaça au moment où des doigts, semblables à ceux du gorille lui étirèrent son oreille droite. Devinant que c’était un geste de bonne camaraderie, le maître de Ciboulette s’amusa à tirer les oreilles de tous ses nouveaux amis.

La tribu rencontrée par Paichel vivait sur le bord de l’eau pendant le jour et occupait une vaste grotte, juchée au-dessus d’une rivière pendant la nuit. Une fois introduit dans cet habitat naturel, qui semblait sculpté à même le flanc d’une falaise, on pouvait découvrir deux couches de pierres. On aurait dit deux grosses galettes de silex, divisant cette grotte en deux étages. Dans la partie inférieure se regroupaient les membres de la tribu et au palier supérieur se trouvaient des centaines de peaux de Mammouths, de boeufs sauvages, de rhinocéros laineux et de rennes. Les primitifs y rangeaient toutes sortes d’outils, faits à partir d’éclats de silex. Au premier étage, on pouvait voir un feu au centre de la grotte, des peaux fort bien tannées et divers ustensiles servant à brocher des viandes, à creuser des trous à légumes (on enterrait une sorte de grosse patate de la taille d’un melon et qui se conservait tout l’été dans le sol de la caverne), à pratiquer des incisions dans la chair de petits animaux et d’autres, plus rudimentaires, pouvaient servir à mille usages courants.

Lorsque les femmes et les enfants virent l’étranger, leur première réaction fut celle de la surprise et même de l’horreur. En effet, si Paichel trouvait ces gens très laids, ce point de vue était réciproque. Comment pouvait-on posséder un menton, des petits yeux bleus, une petite touffe de cheveux sur le crâne et passer pour un bel homme, semblaient se demander ces individus d’une autre époque? L’inconnu pouvait facilement prétendre que ces gens-là se feraient pointer du doigt dans une soirée mondaine et encore plus sur la rue. Les habitants de cette grotte avaient tous des grands yeux noir chocolat, des nez de singe, des oreilles de mini-éléphants, des mâchoires énormes et des dents à l’épreuve des os. Ce n’est sûrement pas l’homme moderne qui inventa la manie d’ouvrir des bouteilles de bière avec les dents! Ces primitifs pouvaient croquer un caillou comme une noisette. Puis, que dire de leur peau brune, rude et dure comme le cuir ! Non, vraiment, pour qui se prenaient-ils pour juger la beauté d’un homme du futur ! semblait se demander le visiteur en les fixant d’un air incertain. Que dire de leur taille, sinon que les grands hommes de cette tribu faisaient à peine les 1m50 et encore...

Paichel voulait être poli et dire quelque chose en “iou” afin de les rassurer. C’est malheureux que l’histoire ne retienne pas le mot célèbre qu’il prononça ce jour-là ! “Coucou”, dit-il en agitant ses doigts devant eux. “Kiou-Kiou”, lui répondit un enfant en se pinçant le nez. Le pauvre homme ignorait, à l’époque, que le mot KIOU-KIOU voulait dire : Sale, pas propre, puant, crotté, etc... Ce jeune garçon au regard réprobateur semblait lui dire “Kiou-Kiou toi-même” tout en s’introduisant ensuite un doigt dans le nez. Ne pouvant expliquer sa méprise, l’homme préféra utiliser un geste fort simple pour se faire pardonner en s’introduisant un doigt dans le nez et en redressant sa mèche de cheveux. Il fit rire l’enfant et même les femmes qui se disaient entre-elles : “Gou-Glou.” On pourrait traduire par l’expression : C’est quelqu’un qui a un bobo dans la tête. Quoi qu’il en soit, cela permit à notre homme de se faire accepter par ces primitifs qui respectaient les fous encore plus que les gens sensés. Tout le monde est normal et donc celui qui agit autrement devait logiquement être un normal, mais...d’ailleurs.

En voyant le Giou lapidé que tenaient trois hommes en posant fièrement devant les femmes, Paichel passa vite au second plan. On arracha les plumes du monstre et son sang noir devait être conservé pour un soir de pleine lune. En effet, les Néandertaliens ne tuaient jamais une bête sans ensuite lui rendre un culte. On pourrait croire qu’ils avaient peur de l’esprit qui pourrait désirer se venger d’avoir perdu son corps ou, peut-être bien, que les autres oiseaux de proies cherchent à s’introduire dans la grotte. En conservant le sang de cet oiseau, c’est son pouvoir et sa force que cette tribu voulait conserver. Il faut savoir que tuer un humain ou une bête éveille toujours une sorte de “culpabilité.” Dès que l’homme des cavernes comprit que chaque plante, arbre, animal et humain possédait un mouvement qui s’applique au mot VIE ou vivant, il éprouva non seulement une peur de prendre la vie à d’autres, mais prit ses distances en rendant des cultes à tout ce qui existe dans la nature. Il est possible que le Néandertalien pratiquait jadis le cannibalisme mais à l’époque où Paichel arriva dans cette tribu, cette coutume alimentaire était déjà abolie. Ce n’est pas parce que ces gens-là étaient plus évolués que d’autres tribus, mais simplement parce qu’ils craignaient de devenir un ennemi à la tribu. Si l’on se place dans la peau de ces primitifs, on réalisera que leur logique avait du sens. En mangeant un ennemi, on mange également ses pensées et donc on agit comme cet ennemi envers sa propre tribu. C’est ainsi qu’on expliquait l’agressivité. On ne sait pas d’où vient cette expression : Veux-tu bien me dire ce que tu as mangé pour être de si mauvaise humeur, mais elle rejoint cette conception archétypale de l’ennemi qui habite le corps de celui qui le mange. Puis, on pourrait se demander si l’expression : Aime ton ennemi comme toi-même, avec un peu de sel et de poivre, aurait fait l’affaire des peuples qui pratiquaient l’anthropophage par goûts naturels ou simplement comme rituels ? Il faudrait le demander aux cannibales ou encore à ceux qui les ont mangés !

Paichel goûta à du steak d’oiseau monstre. Il s’attendait à manger de la viande crue mais il aurait dû savoir que le feu des hommes de la préhistoire cuisait aussi bien que celui du moyen âge. Ce rapace goûtait le poisson ! Que voulez-vous, si la viande de chevreuil ou d’orignal goûte le sapin à un certain temps de l’année, celle du Giou goûtait le poisson à l’année. Ce volatile mangeait n’importe quoi et n’importe qui. C’était un charognard et un gobe-tout-rond. Il était toutefois le plus stupide des oiseaux de la création puisqu’il lui arrivait d’avaler un tas de cailloux avant de s’élancer au-dessus de la rivière. Il perdait vite de l’altitude et chutait finalement au fond de l’eau pour s’y noyer. Soit qu’il était vraiment stupide ou bien suicidaire par nature. On ne le saura jamais puisqu’il disparut comme tant d’autres oiseaux bizarres de l’époque.

La première nuit dans ce monde primitif se fit à la belle étoile. Paichel ne dormait pas; du moins il n’y arrivait pas. Il cherchait à communiquer avec ces hommes qui se donnaient le nom de FIOU-FIOU, les paresseux. Oui, il faut le préciser, cette tribu était loin de représenter les ancêtres véritables de l’Homo Sapiens ou encore, L’HOMME AU SAPIN, comme se plairait à dire Paichel. Non, ces gens étaient venus de très loin pour échapper à une autre tribu Néandertalienne. Des guerres entre familles datent depuis Caïn et Abel. Personne ne devrait toutefois les accuser de quoi que se soit puisque les guerres ont même divisé les anges dans le ciel. On dirait que c’est dans l’air...

Au petit jour, notre homme suivit les chasseurs. On avait pratiqué un grand trou au milieu de la plaine et on attendait l’arrivée d’un troupeau de Mammouths. Ces bêtes immenses et surtout dangereuses prenaient toujours cette direction pour se rendre à la rivière. Il suffisait d’attendre qu’un imprudent tombe dans le trou pour ensuite lui introduire des genres de pieux dans les flancs. Puis, on retirait les défenses énormes pour s’en servir comme traîneau. On plaçait des morceaux de viande sur ces lisses improvisées après avoir dépecé l’animal. Cela prenait deux jours et parfois trois. Paichel songea à inventer la roue pour justement permettre à ces chasseurs de transporter facilement le gibier dans une charrette. Il savait comment faire et la termina au cours d’une autre expédition similaire. Toutefois, ses roues de bois firent frémir d’horreur les chasseurs. Ils reculèrent en voyant cet objet rond en train de rouler sur le sol. Paichel ignorait qu’il venait de profaner un symbole sacré. Les roues étaient rondes comme le soleil. Il fallait être vraiment naïf pour croire que les primitifs ignoraient le principe de la roue. Ils refusaient de voir le symbole lunaire (pleine lune) et solaire, rouler sur la terre. Le cercle de bois fabriqué par le pauvre homme du futur fut jeté en bas d’une falaise et les primitifs le forcèrent à fixer le soleil. En effet, il était rond et par conséquent, tous les objets ronds devaient symboliser le soleil. Ce jour-là, le pauvre Paichel comprit que la roue serait utilisée uniquement lorsque les hommes se croiraient aussi puissants que le soleil. En attendant, on ne devait pas lui voler sa forme pour accomplir des travaux humains. Une pierre qui roulait en bas d’une colline devenait sacrée et personne n’avait le droit de la déplacer.

En quelques mois, le dialogue devint plus facile entre ces gens et celui qu’ils appelaient Piu-Piu. Il faut dire qu’ils le prenaient pour un observateur venu d’ailleurs. On ne parlait pas d’un monde spirituel et encore moins d’un lieu précis. On disait que tout venait d’ailleurs. Quelqu’un qui part ou qui arrive vient d’ailleurs et celui qui naît vient d’ailleurs. Avant de venir dans le ventre de sa mère, un enfant vient d’ailleurs et lorsqu’il meurt, le défunt va encore ailleurs. C’est ainsi que pensaient ces hommes préhistoriques. Paichel apprit leur langue et se fit un devoir de révéler quelques mots utiles à des amis qu’il connut dans d’autres aventures dans le temps. Voici un bref lexique de cette langue “iou.”

Bou-Bou = peine
Diou = soleil
Fiou-Fiou = fatigué
Giou = monstre
Glou-Glou = boire
Gou-Glou = fou, insensé, drôle, étrange
Hou = tuer
Iglou-Hou = froid
Kiou-Kiou = sale
Pitou = ennemi
Pou-Pou = marcher
Sou-Sou = rituel
Tou-Fiou = mourir
Trou = lune
You-Hou = amour

Tous ces mots de la langue “iou” furent traduit selon leurs résonances phonétiques. On pourrait ajouter que le mot Diou-Trou (soleil-lune) servait à nommer également: l’eau, le feu, la source, la rivière, la grotte, le mariage, le mystère et même l’érotisme. Il en était ainsi de plusieurs mots qui pouvaient s’appliquer à une cinquantaine de choses différentes. Paichel comparait cette langue au langage de sourds et muets. Les primitifs gesticulaient à chaque mot pour faire comprendre à quel sens devait s’appliquer celui-ci. Un simple exemple suffira à faire comprendre la logique de cette langue. Un matin, le chef de cette tribu pointa le soleil du doigt et traça un demi-cercle invisible en prononçant le mot DIOU. Il voulait parler du soleil en mouvement. Le même soir, il invita Paichel à regarder les étoiles et fit le même geste en disant DIOU. Il voulait parler du mouvement des étoiles qui brillaient comme le soleil. Le mot Diou représentait non seulement le soleil mais le MOUVEMENT DANS LE CIEL. Comme Diou était le nom du soleil et des étoiles en mouvement, on peut en déduire qu’il signifiait DIEU. Si on se demande parfois la signification du mot “dieu”, il serait bon de savoir qu’il veut simplement dire dans son sens primitif : MOUVEMENT, ACTION, CE QUI BOUGE, CE QUI SE DÉPLACE DANS LE CIEL.

Ciboulette devint la mascotte de jeu des jeunes enfants Fiou-Fiou. Il les protégeait et les amusait du mieux qu’il pouvait en faisant des pitreries devant eux. Paichel passait tout son temps en compagnie des chasseurs et des tailleurs de pierres. Ceux-ci étaient passés maîtres dans l’art de fabriquer des pointes de lances et des outils de toutes sortes. Ils trouvaient d’abord des pierres qui possédaient une forme particulière car, munis de simples marteaux arrondis, ils savaient où les frapper pour obtenir tel ou tel éclat de silex. Leur habilité était telle, qu’ils pouvaient créer une série d’outils ayant la même longueur, largeur et épaisseur. Un jour, Paichel suivit les instructions d’un tailleur et réalisa son premier couteau. Puis, voulant mettre à l’épreuve la dextérité d’un autre tailleur, il dessina un gros coeur sur le sol et demanda ensuite à l’artisan de le sculpter dans la pierre. L’autre fit plusieurs essais infructueux pour réaliser finalement un fort joli coeur. On aurait dit un biface très lisse et légèrement taillé comme un diamant. L’homme le conserva précieusement en attendant de retourner dans le couloir de l’intemporel. Il avait la preuve que l’homme primitif était en mesure de réaliser des merveilles. Ce qui lui manquait, c’était la sécurité. Le Néandertalien était un être si sensible qu’il vivait avec la voix de la nature. Il devait survivre et toute son énergie passait à s’harmoniser avec cette nature qui le dépassait. Il avait peur des orages, des ombres, des courants trop rapides ou irréguliers de la rivière. Ce n’est pas la nourriture qui lui manquait mais, l’instinct de défense. Il manquait d’agressivité. Cette tribu était paresseuse non pas dans le sens de l’oisiveté mais dans celui de l’évolution. Ces gens comprenaient beaucoup plus de choses qu’on pourrait le croire mais, par paresse, refusaient de faire le grand pas vers l’autonomie. En effet, on refusait à Paichel le droit d’enseigner quoi que se soit. On ne voulait pas devoir s’adapter à une nouvelle façon de vivre. Cette chicane entre clans Néandertaliens venait justement de cette impossibilité de vivre en commun. Un chef qui avait son clan ne laissait aucun de ses membres fréquenter ceux des autres clans. Lorsqu’une autre famille inventa un soufflet pour leur feu, cela aurait du servir à d’autres clans mais, rien de cela n’arriva. Cette famille se croyait supérieure à l’autre et les frustrations tournèrent en querelles. Le clan des Fiou-Fiou préféra s’éloigner sans chercher à connaître le principe du soufflet. Dans un monde où chaque tribu évoluait séparément, on devait s’attendre à voir un jour ou l’autre des hommes plus solidaires entre eux, prendre peu à peu le contrôle de ce territoire. Les Néandertaliens seraient vraiment trop divisés entre clans pour faire face à l’homme rude et conquérant, désigné par les anthropologues comme l’HOMO SAPIENS. Sa force serait dans sa facilité de s’adapter aux changements. Si l’Homme de Néandertal était physiquement plus résistant au point de pouvoir traverser deux ou trois périodes de glaciologie sans dommage, sa structure mentale l’empêchait de comprendre la nécessité de vaincre ses traditions. Plutôt que de les adapter au cours des millénaires, il perfectionna sa façon de tailler des pierres, à tanner des peaux et à chasser. Ce n’est pas cela l’évolution. Il oubliait qu’il ne pouvait se permettre de demeurer le même homme lorsque les autres peuples changeraient d’outils et d’habitats au cours des âges. Il demeurait en dehors de la course évolutive, à la fois, bonne et mauvaise, fuyait les tribus qui croyaient déjà devoir s’organiser en clans sociaux et finalement, il ne pensait pas que d’autres hommes pouvaient diverger en croyances.

C’est cela que remarqua l’étranger en passant plusieurs années auprès de cette petite tribu Néandertalienne. Sa simplicité naturelle était remarquable puisqu’elle plaçait sa foi dans la terrible mais merveilleuse puissance de la nature. Ces gens n’avaient pas envie de maîtriser cette mère qui était à la fois, sauvage, dur, généreuse, providentielle et souvent intraitable. Il est vrai qu’ils vivaient souvent dans les cavernes mais, il faudrait aussi admettre que la terre était considérée comme la structure extérieure de la terre-mère. Les primitifs croyaient que la grotte était la partie intime de la terre et par elle, on pouvait retourner dans le ventre qui fit naître les premiers hommes sur terre. Paichel s’était posé la question à savoir si ces gens vivaient dans une grotte par tradition ou par nécessité. Il y avait un peu des deux mais, l’autre raison était mystique. Les Néandertaliens ne voulaient pas quitter le ventre de leur mère. Un anthropologue aurait le goût de sourire en écoutant Paichel dire sans détour que l’homme de Néandertal souffrait mentalement d’une crainte terrible à quitter le sein de sa mère. Il n’était bien que là où s’y trouve une caverne. Il n’a jamais coupé ce cordon “mystique” qui permit à d’autres hommes d’abandonner les cavernes pour évoluer dans le monde. Lorsque l’Homo Sapiens se défit de ce “noeud”, il devint indépendant et surtout cruel envers sa mère la terre. On peut même se demander si le fait d’aimer l’agriculture au lieu de la chasse et la guerre ne fut pas, indirectement relié à cette peur d’être indépendant de maman-terre. Les petits garçons à maman étaient destinés à disparaître pour laisser leur place au grand frère conquérant et “matricide”. Quoi qu’il en soit, un fait demeure certain : ce désir de conquérir la terre peut être associé à l’esprit d’indépendance que l’homme veut obtenir depuis sa naissance.

Les Fiou-Fiou s’attardèrent un soir à écouter Piu-Piu leur raconter ce qui se passait “ailleurs”. Il parla du moyen âge, de ses jolies cathédrales ogivales ou gothiques, de la société bourgeoise, des gens du peuple et surtout des rues de Paris. On riait car pourquoi suivre le trajet des rues lorsqu’on se déplace ? Un primitif lui dit :

- Non, la route faite par les Mammouths est celle qu’on doit suivre pour chasser. Tu dis que des gens prennent toutes sortes de sentiers pour se rendre dans ce que tu appelles leurs maisons ? D’abord, pourquoi fait-on des chemins s’il n’y a pas de pistes à suivre? Puis, pourquoi prenez-vous les pierres des montagnes pour les rassembler dans vos champs? La montagne est l’enfant de Diou et son corps meurt dans vos habitations que Diou n’a pas faites. Ce n’est pas vrai que l’homme vivra un jour dans ce qui ne vient pas de Diou. Il a donné les arbres pour se marier avec le feu et les Fiou-Fiou croient à l’arbre et au feu lorsqu’ils l’utilisent dans la grotte. Mais toi, Piu-Piu, dis-moi ce qui est vrai dans un tas de pierres que tu nommes, maison ? C’est l’homme de ces champs qui dit que maison est maison. Il ne peut dire que pierre est montagne car la montagne n’est plus là. L’homme l’a détruite pour lui voler ses os, sa forme et sa vie. Il possède des pierres mais les enfants qui n’ont pas connu la montagne ne sauront plus pourquoi il y a des pierres. Moi je sais qui est la montagne lorsqu’on me parle d’elle. Toi, sais-tu si des maisons peuvent parler de son ancêtre montagne puisqu’elles ne sont que les os de celle-ci? Ce qui est vrai mourra lorsque ces hommes voudront parler à l’ombre de cette montagne disparue. Ils diront qu’ils sont sages en agissant ainsi. Pour un Fiou-Fiou, on ne devient pas sage en faisant des outils mais en sachant écouter ce que dit la nature. Je vais t’enseigner comment écouter l’animal, la fleur, la pierre, la rivière et la nuit si tu veux !

- Oui, montre-moi comment écouter l’animal. Est-ce que tu sais que je peux parler et comprendre le langage de Ciboulette ?

- Ton chien ne parle pas ; il observe les hommes et apprend à dire comme eux pour recevoir sa nourriture et sa caresse. Ce n’est pas ce que je désire t’enseigner. Un mammouth parle très fort. Il n’obéit pas à l’homme mais à la nature qui l’appelle à la rivière ou à l’accouplement. Si tu t’approches de lui pendant ses amours, tu vas laisser ton odeur et l’animal te sentira de si loin qu’il changera de route pour t’éviter. Tu sais pourquoi ?

- Je pense que le Mammouth n’aime pas se faire observer pendant ses amours ?

- Non, s’il laisse une odeur humaine se mêler à la sienne , il la considérera comme familière et non issue d’une présence étrangère. Sa nature l’oblige à se défendre contre les chasseurs mais lui interdit de s’attaquer à ce qui porte son odeur. Il changera donc de route et le chasseur risque de mourir de faim s’il laisse son odeur dans tout un troupeau, par exemple!

- Le Mammouth sait que le chasseur l’attend dans le champ pour le tuer ? demanda Paichel d’une voix intriguée.

Le primitif lui répondit :

- Depuis toujours le Mammouth passe sur le même sentier et voit ses frères périr sous nos coups de pierres et de lances. Pourquoi demandes-tu s’il sait que nous allons tenter de le tuer ? Le Mammouth accepte de nous nourrir parce que la nature veut qu’il serve à nourrir la tribu de Fiou-Fiou. Avant la chasse, nous demandons au Mammouth de nous parler et de nous demander ce qu’il veut qu’on redonne à la nature pour compenser sa vie. Nous devons faire ce qu’il demande car la chasse suivante sera meurtrière pour l’un d’entre nous. Lorsqu’un chasseur meurt sous les cornes de cette bête, c’est parce que la tribu n’a pas rendu un culte à la mémoire d’un animal que nous avons mangé. Le Mammouth est le guide des autres animaux. Si l’un d’eux est mangé sans le remercier de nous nourrir, c’est le Mammouth qui tuera l’un des nôtres pour nous rappeler que nous sommes les enfants de la nature au même titre qu’eux.

- Comment se fait ce contact entre le Mammouth avant la chasse?, demanda Paichel.

- Par le toucher de la bête que nous avons mangée.

- Comment pouvez-vous toucher une bête que vous avez mangée ?

- Elle vit en nous. Nous lui parlons la nuit qui suit le repas.

- En dormant ? demanda Piu-Piu.

- Oui, nous voyons la chasse que nous ferons le jour suivant et surtout quel animal viendra tomber dans le fossé. On lui parle de nous et il nous parle de lui. Il nous indique ensuite quoi dire lorsque nous nous approcherons de lui pour le tuer.

- Il se laisse tuer ?

- Non, il nous communique ce que nous devrons lui dire en le tuant car cet animal connaît son destin depuis que nous avons parlé ensemble dans l’AILLEURS. Il a même rêvé de notre tribu et au sort qui lui est réservé.

Vraiment intrigué, Paichel lui demanda ainsi :

- Le Mammouth que vous allez tuer le lendemain vous demande quoi au juste?

- Il demande le respect de son esprit. Il demande de le considérer comme un messager de Diou-Trou. Celui qui mange la vie sans se soucier de remercier cette vie qui le nourrit n’est pas sage.

- Je voudrais pouvoir communiquer avec un animal.

- Alors, choisis l’animal car il y a des façons différentes de s’adresser aux bêtes selon leur nature. Le renne est très compréhensif et demeure ton ami après sa mort. Si tu t’adresses à un seul renne avec respect, il finira par te donner le nom originel de sa race. Si tu as faim, ce nom attirera aussitôt un renne dans le fossé que tu auras creusé pour le faire périr et le manger.

- Tu connais le nom originel du renne ?

- Nous avons tous un ami animal qui nous aide à comprendre l’attitude de ceux de son espèce. Dirais-tu à un étranger le nom qui pourrait attirer toute une tribu dans le fossé d’un étranger ? Si un ami animal te donne le nom originel de son clan, tu devras le garder pour toi. En le donnant à un autre, tu détruiras l’amitié que cet animal avait pour toi. S’il te donne ce nom c’est pour te venir en aide si tu as vraiment très faim. Ce nom résonne dans l’air et est entendu par tous les rennes. L’un d’eux viendra à ton appel car si tu connais le cri originel des rennes, c’est parce que tu es l’ami du renne.

- Alors, veux-tu m’enseigner comment me faire l’ami d’un renne ?

- Il faudra plusieurs Diou et Trou pour réussir mais tu pourras ensuite te faire l’ami du renne que nous mangerons bientôt.

Trois jours plus tard, un renne fut tué et le chef des Fiou-Fiou montra l’animal étendu dans un champ en disant à Paichel : “Voilà une bête magnifique. Son esprit peut devenir ton ami si tu peux dessiner son corps dans la grotte. Il te suffit de toucher cette bête jusqu’au moment où tu te souviendras, de mémoire, la forme de son corps.” Piu-Piu passa toute la journée à toucher le panache, la tête, le tronc et les pattes de l’animal afin de pouvoir mimer les mêmes gestes sur les parois de la grotte. Ce que le chef voulait qu’il fasse, c’était de ritualiser des centaines de gestes qui lui feraient connaître les moindres détails du corps de ce renne. Du bout des doigts et les yeux clos, l’homme touchait cette bête comme le ferait un aveugle qui voudrait connaître la forme exacte d’un objet inconnu. Ce rituel dura plusieurs heures. La nuit suivante, Paichel se retrouva seul dans une grotte sans aucune lumière. C’était une noirceur complète. On lui avait donné le sang de l’animal dans le crâne d’un Mammouth. Notre homme tenait celui-ci à deux mains et avançait dans cette caverne en se guidant uniquement par le son des os que frappait son guide spirituel. Le vieil homme se tenait au fond de la grotte et attendait son élève en marmonnant des mots incohérents. En réalité, il parlait à l’esprit mystique de la nuit. Paichel se souvient d’avoir senti à plusieurs reprises des pressions dans le cou et sous les coudes comme si une force le guidait vers son maître. Puis, arrivé devant un mur, l’élève déposa le crâne sur le sol et trempa ses dix doigts dans le sang du renne. Au début, Paichel tremblait de peur en tentant de refaire sur le mur les mêmes gestes qu’il pratiqua sur l’animal. Puis, peu à peu, ses doigts dessinèrent le panache du renne. L’homme ne voyait absolument rien dans cette grotte. Il avait touché tant de fois ce panache qu’il pouvait refaire les gestes en dessinant presque dans la perfection cet animal de la tête aux pieds. Paichel se souvient d’avoir eu l’impression très nette de toucher le corps de l’animal sur le mur. Dès qu’il tentait de raisonner ce phénomène étrange, il perdait cette impression. Au bout de quelques heures, il vit non seulement dans le noir ce qu’il venait de dessiner, mais avait la nette impression de caresser un renne bien vivant et étendu sur une herbe si verte qu’elle n’était pas terrestre. Plus étrange encore, notre homme était persuadé d’être à l’extérieur de la caverne. Il voyait par la lumière du jour mais son maître lui dit : “Si tu vois ailleurs et qu’il fait clair, donne ton nom à cet animal qui vit dans sa nouvelle prairie. Il te parlera de lui. Ecoute-le sans lui poser de questions et attend qu’il t’offre son amitié. Il se peut qu’il pleure en réalisant qu’il n’a plus de corps mais console-le comme le ferait un ami. Il se peut qu’il ait faim mais fait le geste de lui offrir à manger. Il se peut qu’il ait soif mais fait le geste de lui offrir à boire. Lorsque tu l’auras traité en ami par tes gestes sincères, ce renne deviendra l’ami de l’homme qui l’a consolé et offert de quoi boire et manger.”

Paichel fit tout ce que lui demanda le maître et le renne lui adressa la parole en disant: “Je t’offre mon amitié et celle de mes frères. Si tu viens me parler trois nuits de pleine lune, je veillerai à t’indiquer quel renne viendra se jeter dans la fosse.” L’homme ne voulait pas chasser. Son désir était de pouvoir parler avec l’esprit des animaux. La bête lui dit : “L’animal est un être entièrement soumis aux lois de la nature. Si tu veux entrer en communication avec lui, observe bien ses instincts. Si tu as quelque chose à communiquer aux animaux, c’est par le rêve que tu parviendras à le faire correctement. Un animal qui chasse la nuit ne pourra entendre ton message à moins que tu dormes le jour comme lui. Il existe un monde commun à tout ce qui vit en esprit. Un jour, je te dirai quel est le cri originel du renne et peut-être celui de l’humain. Il existait avant de naître et c’est par un son originel qu’il prit forme et c’est également par un autre son qu’il attire la mort, le malheur et l’amour.”

Paichel apprit plusieurs choses avec ces primitifs. Ils possédaient des pouvoirs exceptionnels puisqu’ils écoutaient la voix de la nature. Toutefois, plusieurs tribus perdirent ces facultés de communiquer avec l’AILLEURS lorsqu’elles trouvèrent une nouvelle façon de vivre. On ne peut communiquer avec un arbre qui ne fait pas partie de sa vie. Il devient un étranger, tout comme deux hommes le sont en vivant sur la même planète. La rivière ne parle plus aux hommes qui vivent dans des préoccupations matérielles et sociales. Peu à peu, des tribus adoptèrent des lois régies par des accords de concessions. Pour obtenir sa sécurité, l’homme de la société devait abandonner une partie importante de son libre arbitre. Il oubliait le chant des oiseaux, le vent soufflant entre les feuilles des arbres et des plantes. Il ne voyait plus passer les nuages et ne cherchait plus à communiquer avec l’esprit qui vit dans la fleur. Il prit possession d’un monde dans lequel il se sentirait toujours étranger car il n’existait plus de complicité entre sa nature et celle qui le nourrit à chaque jour. C’est à cela que songea Paichel après ses expériences dans la grotte.

L’homme du moyen âge ne pouvait faire partie de cette tribu. On l’acceptait comme un ami mais non comme un frère. Il existait une trop grande division culturelle entre eux et Piu-Piu. Un jour, Paichel s’amusa à dessiner un X dans une grotte afin de laisser sa signature à la postérité. Les Fiou-Fiou secouèrent tristement de la tête comme s’ils voulaient lui dire : “Mon pauvre ami, lorsqu’on s’amuse à vouloir laisser sa marque dans le monde, on vit déjà loin de la réalité.” En effet, le Néandertalien ne croyait pas à la réalité de la mort. Il employait le mot Tou-Fiou, pour désigner ce sommeil paresseux. Tou était le sommeil et Fiou désignaient à la fois la paresse et le Fiou-Fiou. Mais le mot “paresse” était synonyme d’abandon, de lâcher prise, de ne rien garder, de repartir ailleurs de la même manière qu’on y est venu. Un Fiou-Fiou se faisait enterrer dans la position du sommeil qu’il prenait de son vivant. On disait à Paichel que chacun doit venir d’ailleurs pour comprendre comment cela se passe ailleurs. Comme les Fiou-Fiou vivaient dans une caverne, on donnait au mort une partie de la caverne pour qu’il se souvienne d’avoir été membre de cette tribu. On croyait que ce sommeil paresseux pouvait effacer le souvenir de son expérience sur terre et que l’esprit devait alors revenir sans cesse pour tenter de comprendre ce qu’il a oublié. On laissait donc des cailloux dans la fosse pour que le mort puisse se souvenir de son expérience terrestre. Il partait sans emporter ces petites pierres puisqu’on arrive et on repart les mains vides mais, dès qu’il oubliait ce qu’il était venu apprendre sur terre, le mort endormi découvrait son corps entouré de pierres. Il se rappelait aussitôt sa vie terrestre.

Un matin, des chasseurs virent des pistes humaines dans un champ. Leurs formes ne laissaient aucun doute dans l’esprit des Fiou-Fiou ; des étrangers venaient de fouler leur territoire et tuaient des rhinocéros laineux sans tenir compte de leurs tailles. Paichel savait que les Néandertaliens ne chassaient que les bêtes adultes. Il arrivait parfois de devoir tuer un jeune Mammouth ou un petit rhinocéros blessé afin de lui éviter de souffrir inutilement. Mais là, dans cette prairie, on avait massacré une dizaine de bêtes pour leur retirer uniquement le coeur. Le chef de la tribu dit craintivement à Piu-Piu : “Ces chasseurs ne sont pas des Fiou-Fiou d’ici ou d’ailleurs. Ils possèdent le coeur de ces bêtes pour obliger les autres animaux à quitter notre territoire. Je ne sais pas comment les hommes de ton monde d’ailleurs feraient pour retirer la nourriture à une tribu afin de l’affamer. Ici, les animaux s’offrent en nourriture et si un chasseur ne les mange pas, ils fuient dans une autre prairie. Regarde tous ces animaux et dis-moi si le respect de leur chair existe ? Tu vois, on a voulu détourner l’esprit de ces bêtes qui regardent leurs corps qui ne servira qu’à nourrir les Giou.”

Le chef des Fiou-Fiou avait raison. Les oiseaux-monstres planaient au-dessus de la plaine afin d’avoir leur part du festin. Le massacre de rhinocéros attira des centaines de Giou et le chef des primitifs s’écria : “Ils vont nous attaquer ; dépêchez-vous de reconduire les femmes et les enfants à la grotte.” Il était déjà trop tard pour fuir. Plusieurs femmes s’armèrent de pierres en serrant leurs enfants sur elles. Des oiseaux arrivaient de partout et griffaient les Fiou-Fiou. Ciboulette était un féroce ennemi puisque ses crocs parvenaient à égorger les oiseaux qui osaient s’approcher de son maître. Paichel se défendait courageusement tout comme les hommes et les femmes de la tribu. L’un des monstres volants chercha à soulever un jeune garçon dans les airs afin de l’emporter pour nourrir ses Giouions (oisillons). La pauvre mère cria en voyant son fils se faire introduire les griffes redoutables autour de son cou. Ciboulette chargea sur le Giou et lui fit tant de morsures que l’oiseau abandonna sa jeune victime pour se battre contre le chien. Paichel vit alors avec horreur son compagnon se faire soulever dans le ciel par un autre Giou. Il chercha à s’accrocher aux pattes de Ciboulette et d’autres primitifs cherchèrent également à empêcher le monstre de fuir avec la pauvre bête. Cette fois, la victoire était pour les Giou et non pour les Fiou-Fiou. Ciboulette était blessé mortellement et l’oiseau quitta le combat en emportant son butin. Paichel lança des pierres et frappa l’oiseau à plusieurs reprises mais celui-ci s’éloigna en tenant le chien entre ses griffes. Comme la douleur le rendit fou de rage, l’homme frappa plusieurs Giou sur la tête. On aurait dit que ses poings résonnaient comme des masses de fer sur le crâne des volatiles. Les Giou s’effondraient les uns après les autres sur le sol couvert de sang. Finalement, c’est dans la fuite que ces oiseaux de malheurs cherchèrent le salut. Le chef des Fiou-Fiou vit cet enfant dans les bras de sa mère qui semblait le bercer. Il était mort et donc “endormi pour toujours”.

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